Xi’an et son armée enterrée

Pour rejoindre Xi’an et sa fameuse armée de soldats enterrés, nous avons opté pour un train de nuit au départ de Beijing pour 260 RMB chacun (soit environ 30 euros). C’est donc à 4h du matin que nous sommes arrivés dans cette ville encore endormie… tout comme nous d’ailleurs. Nous avons attendu tranquillement une heure plus décente au MacDo en essayant de rattraper un peu de retard sur notre blog.

 A Xi’an, nous sommes hébergés chez Bruce, un couchsurfer chinois de 28 ans. C’est une de ses amies d’école qui est venue nous chercher aux alentours de 9h pour accompagner chez lui.

Le couchsurfing oblige parfois à des concessions car Bruce vit à « Trucks City Park » qui pourrait se traduire par « ville des camions », elle est située au nord de Xi’an à plus d’1h30 en bus du centre-ville. Il loue un appartement dans une résidence assez caractéristique des nouvelles habitations qui fleurissent en banlieue des grandes villes de Chine : elle comporte une centaine de bâtiments quasi identiques construits les uns à côté des autres.

Elle abrite en grande majorité des ouvriers qui travaillent dans les usines aux alentours ainsi que leurs familles. L’usine principale est celle du constructeur Shacman, où sont fabriqués des camions de chantiers et des bus qui sont ensuite vendus partout en Chine: le marché se porte bien vu le nombre de chantiers de construction en cours dans toutes les villes. L’entreprise emploie plus de 20 000 personnes sur le site. Bruce y travaille dans le domaine de l’import de pièces mécaniques venant d’Allemagne (moteur et transmission) car d’après lui leur qualité est supérieure à celles des pièces chinoises.

« Truck City Park » existe seulement depuis une dizaine d’années : elle fut construite afin de répondre aux besoins en logement des ouvriers de l’usine et des usines des fournisseurs voisines.

C’est dans une des trois plus grandes tours que se trouve l’appartement de Bruce. Dès notre arrivée nous avons eu une impression étrange : l’intérieur était très récent mais quasiment vide. En effet, la cuisine ne comportait pas de frigo ni même la trace que quelqu’un l’ait déjà utilisé, une des deux chambres était totalement vide et la deuxième ne comportait qu’un lit plutôt spartiate et une minuscule armoire. Le plus surprenant étant quand même le salon : transformé en salle de classe avec des pupitres et un tableau à craies! Nous commencions à nous demander où nous étions tombé, avant que l’amie de Bruce nous explique qu’il avait emménagé récemment ici et qu’il avait l’habitude de recevoir des élèves pour les aider à faire leurs devoirs histoire d’arrondir ses fins de mois. Il n’a malheureusement plus le temps de le faire depuis qu’il a changé de travail.

Lors de sa pause déjeuner, Bruce nous a rejoints et informé que nous allions pouvoir disposer de l’appartement pour nous tous seuls, car lui dort chez des amis à deux blocs de là. Il nous a invité à manger dans un fast-food en bas de chez lui et nous a fait essayer un sandwich spécialité de Xi’an, que nous ne recommandons pas car cela ressemble à un kebab avec un peu de viande et beaucoup de gras à l’intérieur, on se serait presque crus en Mongolie!

Même si nous étions au départ un peu surpris d’être logés si loin de la ville ce fut pour nous l’occasion de découvrir un autre aspect de la vie en Chine, celui des millions de travailleurs qui viennent s’installer dans des villes dortoirs pour tenter de gagner plus d’argent qu’à la campagne.

Nos trajets en bus nous ont ainsi permis d’observer cette urbanisation massive qui se caractérise par la construction de centaines d’ensembles d’immeubles en banlieue des villes chinoises.

Lorsque l’on se promène de nombreux panneaux présentent les nouvelles résidences en construction comme étant des endroits où il fait bon vivre, les images sont souvent bien loin de la réalité car la qualité de ces constructions laisse souvent à désirer. A titre d’exemple dans l’appartement de Bruce, certaines prises électriques faisaient tout disjoncter, les canalisations refoulaient des odeurs peu agréables et les fenêtres étaient déjà brinquebalantes, dix ans seulement après sa construction.

La Chine est un pays où nous nous sommes sentis constamment en sécurité. Ces grands ensembles d’immeubles ne sont pas synonymes d’insécurité comme cela peut parfois être le cas en France. Le soir, c’est d’ailleurs amusant d’observer la vie à l’intérieur de ces résidences, entre les jeunes qui jouent au basket ou au badminton et les nombreuses personnes qui se regroupent pour danser ou faire des exercices sur les places publiques ou aux pieds des immeubles.

Bruce nous a proposé de nous emmener en ville après sa journée de travail pour assister au spectacle gratuit sons et lumières des fontaines de la grande Pagode (la plus grande fontaine d’Asie) qui a lieu 3 fois par jours. Le show dure une demi-heure et est vraiment très sympa car les fontaines sont synchronisées avec la musique et les éclairages, avec comme décor de fond la grande Pagode âgée de plusieurs centaines d’années.

Nous avons ensuite flâné dans les rues aux alentours et apprécié le retour à un calme relatif de la ville. Nous sommes rentrés en taxi car malheureusement les bus desservants la grande banlieue s’arrêtent à 19h30.

Le lendemain nous nous sommes rendus sur le second lieu le plus touristique de Chine après la grande muraille: l’armée des soldats enterrés.

Cette armée constitue une partie du mausolée de Qin Shi Huang, le roi des Qin qui mit fin à la période féodale en réunissant les Royaumes combattants, et devint ainsi l’unificateur de l’Empire de Chine, plus de deux siècles avant JC. Le roi est également connu pour avoir été le créateur de la Grande Muraille.

Il a fait construire ce mausolée dès le début de son règne pour protéger sa tombe après sa mort. D’après les écrits d’un historien ayant vécu un siècle après la mort de l’empereur, la réalisation de l’armée aurait nécessité presque 40 ans et mobilisé environ 700 000 hommes ! Les ouvriers ayant assistés à l’enterrement y ont été emmurés vivants pour ne pas divulguer le secret de la localisation de la tombe. Après la mort de l’empereur la tombe a été découverte, pillée et brulée par Xiang Yu (un chef militaire rival) qui en plus de casser une bonne partie des statues a volé la quasi-totalité des armes. Ensuite, le site est tombé dans l’oubli jusqu’à la récente découverte (années 70) de morceaux de poteries par un agriculteur alors qu’il s’apprêtait à construire un puits.

A ce jour, seule une petite partie des soldats a été découverte car le mausolée s’étend en réalité sur 56km². Les archéologues ont encore de nombreuses statues à sortir de terre et à reconstituer via un travail minutieux.

Le site que l’on peut visiter aujourd’hui est constitué de 3 fosses : la plus grande réunit plus de 6000 soldats de terre-cuite mais aussi des chevaux et des chars. Ce qui impressionne le plus c’est qu’ils sont tous différents : les visages, les tailles, les morphologies ou bien les habits et armes…chaque statue constitue une œuvre d’art à part entière. Les soldats ont été disposés en escadrons faisant face à la porte du tombeau, à une profondeur de 5 m sous terre. Ils reposent sur des sols pavés, entourés de murs qui soutiennent des toits en bois, eux-mêmes recouverts de terre. Les soldats que l’on observe debout dans les fosses ont été reconstitués à partir des morceaux trouvés par les archéologues.

Nous avons appris que la surface de certaines armes a à l’époque été recouverte d’une couche de 15 à 20 microns d’oxyde de chrome pour les protéger de la corrosion, ce qui explique leur exceptionnel état de conservation. Il faut savoir que cette technique a été réinventée par les Allemands et les Américains respectivement en 1937 et 1950, avec donc beaucoup de retard.

Les alentours du lieu ont bien changés depuis sa découverte. Sur une vidéo qui résume l’histoire du site, on peut observer qu’il n’y avait que des champs or la route que nous avons empruntée entre Xi’an et le site archéologique ne nous a même pas donné l’impression d’être sortis de la ville.

Nous sommes rentrés un peu fatigués par les 6 heures de transport de la journée et avons retrouvé Bruce devant l’entrée de la résidence pour aller manger. Cependant nous avons été attirés par de la musique provenant d’une sorte de chapiteau situé en face de la rue, dans lequel avait lieu un spectacle gratuit et peu commun. Nous sommes donc aller jeter un coup d’œil, à l’intérieur le public était majoritairement constitué d’hommes qui regardaient le show en fumant des cigarettes. Sur la scène 3 demoiselles sont apparues et ont exécuté une chorégraphie, dont le manque de coordination montrait clairement qu’elles étaient amatrices! Une fois la « performance » terminée, les choses sérieuses ont commencé… Deux des filles sont remontées sur scène afin d’entamer un strip-tease sur une musique avec pour uniques paroles la voix d’une femme simulant un orgasme. Pas très fin mais ce deuxième show leur valu bien plus d’applaudissement que le précédent.

Pour le diner nous avons mangé des nouilles sautées préparées dans la rue pour moins d’un euro : elles étaient tellement bonnes que l’on a demandé la recette:

Le dernier jour nous nous sommes baladés dans Xi’an, nous sommes allés voir les tours des tambours et de la cloche, qui avaient la même fonction que celles que nous avions visité à Pékin. Mais c’est dans le quartier musulman que nous avons passé la majorité de notre temps. Il faut savoir qu’il y a environ 1200 ans des marchands perses et arabes sont venus s’installer à Xi’an, puis ont épousés des chinois, fondant ainsi la communauté musulmane de la ville. Ce quartier est l’un des plus animés, et bien que touristique de nombreux locaux le fréquentent aussi. Le long des ruelles on y trouve des petites échoppes, des cantines, des artisans, le tout dans une ambiance très sympa! On peut y manger de tout et à toute heure.

Nous y avons déjeuné une soupe locale avec des morceaux faits à base de farine et des tranches de bœufs: pas mauvais mais pas léger.  Lors de cette journée nous nous sommes aperçus que notre couchsurfer, bien qu’ayant fait toutes ses études dans la ville, semblait ne pas bien la connaitre car nous étions obligés de le guider et nous lui avons fait découvrir la grande mosquée. De plus il semblait s’être très vite attaché à nous (bizarre après seulement quelques heures passées ensembles) et le fait que nous quittions la ville le soir le déprimait, il ne parlait quasiment plus et se contentait de marcher doucement derrière nous, instaurant une ambiance un peu pesante. Nous furent donc soulagés de partir pour Nanjing!

Xi’an n’est pas un endroit qui nous a particulièrement plu malgré une histoire ancienne, un centre agréable à arpenter et des jolis remparts l’entourant : la ville nous a donné l’impression de s’être trop urbanisée et surtout trop vite. Ceci a eu pour conséquences de détruire la nature aux alentours et notamment les protections naturelles comme les arbres : la poussière entre donc facilement dans la ville et accentue encore la pollution de l’air. Autour des quartiers en construction le paysage est défiguré et pollué, ce qui à nos yeux est un vrai gâchis et sera probablement préjudiciable pour les habitants dans les années à venir.

Cette impression fut peut être renforcée par notre première expérience de couchsurfing mitigée, mais intéressante de par ce nouvel aspect de la Chine que nous avons pu vivre de l’intérieur.